J’aime les croquants au miel.
par lolmaquerelle
Pour relire J’aime les bagels. :
https://ma-querelle.net/2013/10/29/jaime-les-bagels/
Salut mon amour, aujourd’hui, je te parle dans ma tête pour la première fois depuis très longtemps, un peu comme je faisais quand on était ensemble avant d’aller te rejoindre quand je pensais à quelque chose de drôle et que je me disais ah faut trop que lui conte ça! ah faut pas que j’oublie de lui dire ça, pis je marchais plus vite pour pas perdre mon idée ou des fois même je l’écrivais dans mon cell, dans mon bloc-note, je te jure, je te l’ai jamais dit et c’est une des seules choses que je ne t’ai jamais dites, mais je te le jure, c’est vrai. Sauf que là, je m’en vais pas te rejoindre, je m’en vais rejoindre Anna, celle qui te remplace dans mon lit pis à la table de la cuisine quand je mange mes croquants au miel le matin avec mon café. Anna mange mes céréales, je les partage avec elle, aussi, elle te remplace dans mes dessins des fois, même si je pense que les faces que je dessine sur son corps sont souvent un mélange de la tienne pis de la sienne, je sais pas trop, c’est bizarre elle me dit toujours qu’elle ne se reconnaît pas dans mes dessins, moi je sais que c’est elle pourtant, c’est peut-être comme quand on rêve. Fais-tu encore des cauchemars ? Je suis désolé de ne plus être là pour te jaser la nuit quand tu en fais, dans un sens je dis ça, mais je te rassurais plus par habitude que par véritable envie. Bref c’est pour ça que je te parle dans ma tête aujourd’hui et pas par écrit, parce que je pense que j’ai envie d’être un peu méchant avec toi, mais ça a pas rapport, je te jure t’as rien fait.
Je te parle aujourd’hui avec une voix qui est comme mes dessins, un heureux mélange de ce que je connais, dans ce cas-ci, c’est un mélange de ta voix fatigante et de la mienne. Sérieux jusqu’à tout récemment, toi et moi, c’est réellement tout ce que je connaissais, c’est pas normal mon amour, même si j’aimais ça nous connaître autant. Chaque fois que je pense à toi, je me punis avec une pensée pour Anna. Elle est pas meilleure que toi, c’est juste différent, elle me connaît, mais différemment, j’ai le choix de lui mentir ou pas, elle sait pas encore tous mes tics, elle m’associe à certaines choses dans son quotidien auxquelles toi tu m’associais jamais et je sais pas si c’est mieux, comme je te dis, mais c’est différent et ça fait tellement de bien. L’autre jour, ma mère a vu ta mère à l’épicerie et elles ont parlé, je me demande combien de temps ça prendra pour que ma mère et celle d’Anna se rencontrent, je suis pas pressé, c’est pas de leurs affaires ce qui se passe entre Anna et moi, ça m’a dérangé que nos mères se parlent à l’épicerie, mais je sais pas pourquoi. Avec Anna des fois elle me dit : «Laisse faire ça, je vais le faire, c’est moi la fille.» Je sais que ça t’écoeure parce qu’ensemble on riait des tâches genrées, mais des fois ça me fait du bien qu’elle soit complètement inconnue à ce qu’on se disait, un moment donné, je lui dirai peut-être que ça m’écoeure quand elle dit ça, mais je veux pas lui faire de peine, peut-être que je lui dirai jamais. C’est ça, je pense, l’affaire avec Anna, c’est que j’ai peur de la casser, je la trouve fragile, toi et moi on aurait pu se faire la violence conjugale avec les yeux tous les jours de notre vie dans les derniers temps, tu fais partie de moi et je fais partie de toi et cette partie-là de moi elle est toujours là, mais dès que j’y pense j’essaie d’avoir une pensée pour Anna, je te dis elle est comme un bibelot, je sais que ça sert à rien d’être avec quelqu’un de cassable, mais elle au moins, pour le moment, elle m’aime au complet et je peux lui mentir. Ouash je t’imagine avec un petit sourire en ce moment, tu te dis : «Il lui ment, moi il me mentait pas». C’est trop pas ça que j’ai dit, tu vois ça m’écoeure de penser à toi dans moi autant. J’ai le choix de lui mentir et je choisis de pas le faire, toi, tu avais tellement raison que le feeling était comme un millier d’épingles qui me rentreraient dans le coccyx en même temps pis que quelqu’un pèserait vraiment fort pour que je les sente du mieux possible pis mettons d’autre monde me tiendrait les bras et les jambes pendant ce temps-là. C’est exactement cet effet-là que t’avais sur moi quand t’avais raison. Quand Anna a raison, je suis fier d’elle. Je suis fier d’être à ses côtés, je la félicite.
Quand on fait l’amour, oui j’en suis rendu là, une chance que tu m’entends pas, mon amour, une chance que j’ai mes écouteurs, une chance que t’entends pas notre voix dans ma tête. Quand on fait l’amour, Anna et moi, au début j’avais l’impression que je jouais un genre de personnage, j’exagère, je veux pas dire personnage, surtout que j’imagine ta face si t’avais entendu que j’ai dit le mot personnage t’aurais été tellement fière de te dire qu’avec toi j’en jouais pas, ferme-la, Ah fuck les épingles reviennent. Quand je fais l’amour avec Anna, je fais plein de choses que j’aurais pu faire avec toi, mais que je faisais pas parce qu’on avait une certaine manière de faire l’amour et que ça aurait été bizarre de faire l’amour comme ça avec toi, pas que j’aimais pas faire l’amour avec toi, au contraire, c’est encore à ça que je pense quand je suis tout seul, sauf que faire l’amour avec Anna c’est une des meilleurs choses qui me soient arrivées pour mon estime de moi-même. Elle me regarde d’une façon dont tu m’as jamais regardé, elle me trouve tellement beau et pas parce qu’elle trouve que je suis devenu beau depuis que j’ai enlevé mes broches en secondaire 4, elle me trouve homme et sexy et fort et rough and tough et tout le kit qui va avec le fait qu’elle en a jamais assez de moi, je sais ça fait juste 3 mois, mais c’est ça que je te dis quand je te parle de mon estime. ELLE ME TROUVE FANTASTIQUE, SAIS-TU COMBIEN DE TEMPS ÇA FAISAIT QUE J’AVAIS PAS EU L’IMPRESSION D’ÊTRE FANTASTIQUE, MON AMOUR? Oui tu me disais merci quand je faisais la vaisselle, oui tu me disais merci quand je te faisais jouir, oui tu me disais merci quand je changeais le sac de poubelle ou quand je t’installais vraiment confo dans le lit avant de m’installer moi-même quand on écoutait un film, mais tu me trouvais pas fantastique, mon amour. Avoue-le.
Je suis allé souper chez Fred l’autre fois avec Anna, Myriam était là et ça paraissait qu’elle était mal à l’aise, mais c’est juste parce que je la connais que je le sais, t’inquiète pas, elle m’a rien dit, je sais que t’es encore très proche d’eux, ça me dérange pas, elle m’a raconté comment t’étais saoule la semaine d’avant, je te trouve encore vraiment drôle, ça a dérangé Anna, mais je m’en foutais, c’était la première fois que j’avais l’impression que t’étais si près depuis les trois derniers mois. Myriam m’a parlé de toi, mais c’est pas parce que j’ai pris de tes nouvelles, c’est important que je te le dise, parce que des fois j’imagine qu’on revient ensemble genre dans cinq ans, mais je peux pas te le dire, parce que j’ai pas vraiment envie de retourner chez nous. Je trouve ça laid chez nous dans mes souvenirs, en même temps que je suis vraiment triste que ce soit d’autres personnes qui habitent là parce que ça veut dire que je peux jamais revenir, mais pour de bon, parce que notre maison est morte, je me demande si les nouveaux nourrissent Belzébuth, je devrais aller leur porter de la bouffe pour qu’ils n’arrêtent pas de le nourrir, mais je le ferai pas, je veux pas voir leur salon. Je sais aussi qu’Anna, c’est pas la bonne et qu’elle sera pas la dernière, je sais aussi que je veux encore appeler mon enfant Louis, mais si je l’appelle Louis avec Anna c’est weird parce qu’elle est pas toi.
J’ai eu une entrevue pour une nouvelle job et je me suis coiffé tout seul, mais j’étais cute pareil, j’ai eu l’emploi. T’aurais été fière de moi. Je m’arrange toujours pour que tu sois fière de moi, même si tu me trouveras jamais fantastique.
Photo : Christian Quezada
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