Plus grande que moi sur les épaules de mon père.

par lolmaquerelle

Aujourd’hui je suis triss-pour-vrai, peut-être que demain je serai triss-pour-autre-chose, mais étant donné qu’aujourd’hui j’suis triss-pour-vrai, c’est certain qu’en ce moment je crois pas que ça va passer.

La différence avec d’habitude c’est que d’habitude je peux aller jouer avec mes bébelles électroniques dans mon lit un peu pis pas penser en écoutant de la musique ou des niaiseries, je ris ou je ris pas pendant un certain temps et là ça finit par passer parce que je veux arrêter d’être triss dès que l’occasion se présente, je veux pas être triss-pour-vrai, ça fait trop mal.

MAIS AUJOURD’HUI. J’ai froid, je veux pas faire de bruit parce que tout le monde dort autour de moi ou vit en quelque part où je suis pas, je sortirai pas d’ici certain et je veux pas réveiller ceux qui sont proches parce qu’estik que j’ai pas envie d’les entendre, je peux pas aller prendre une marche parce que je viens de le dire j’ai froid coudonc je me répète mais je le pense encore fak ça compte, j’ai faim, mais sérieux pas tant que ça, c’est sûr que je mangerai pas, je dis j’ai faim un peu comme on dit «salut ça va» quand on croise quelqu’un. J’ai soif de j’sais-pas-quoi, pas soif genre «je boirais une piiiscciiiinne môôôôôôman» non j’ai soif dans le sens que y’a rien qui va me plaire, comme un lendemain de veille d’après j’sais pas mettons 4 jours consécutifs de brosses-bières + 34 clops par soir, kin toé. Ça m’est jamais vraiment arrivé, mais ma soif ressemble à celle-là, bonne chance pour trouver de quoi qui va m’plaire.

Là, étant donné qu’aujourd’hui ben j’suis triss-pour-vrai toute la journée je vais être un peu déçue de chaque petit sourire que je vais faire parce que dans ma tête, ben je suis triss pis c’est ça l’important, moi aussi j’ai le droit d’être triss, c’est important de vivre sa trisstess. Quand les autres sont triss je suis là pour eux je jongle un peu avec leurs situations, je vais les regarder faire des devoirs, je vais être la présence qu’ils ont pas, je vais être leur doudou pendant quelques heures, je vais fumer avec eux, même si je fume même pu, ben là fuck RIGHT HERE RIGHT NOW, MY TURN qu’ils me le prouvent que j’ai pas recommencé à fumer pour eux pour rien. Aujourd’hui j’suis CléopâtreslashCésar et je veux qu’on me nourrisse aux raisins dans une grappe en haut de ma bouche sans que je bouge, ou presque pas, à peine pour pas me faire des plaies de lit, juste bouger un peu pour me tourner de bord dans mon grand lit pour m’étirer un peu comme si j’étais un gros chat sinon pas bouger du tout merci parce que criss j’suis triss pis me semble ça m’arrive pas souvent. Please y’a tu quelqu’un qui va bien vouloir m’aider à être triss au complet genre pas me faire une joke pour détendre mon atmosphère de trisstess non j’ai besoin d’un coup de poing dans’ face pour que ça paraisse que je suis triss-pour-vrai pis que c’est pas un fake-triste ni un prétexte-triss, je suis triss au complet, je veux l’être toute la journée, c’est mon tour, j’ai le droit.  Oui un coup de poing s’il-vous-plaît, je veux tomber en pleine face à terre fort et que quelqu’un me prenne dans ses bras et que j’ai rien d’autre à faire que de chigner vraiment fort pendant qu’il m’essuie la face pleine de sang de ma trisstess qui me coule au grand jour sur le visage. Les passants s’arrêteraient pour se dire dans leurs têtes «ah cette personne a le regard tellement triste, c’est poignant» et j’entendrais leurs pensées parce que je suis CléopâtreslashCésar et je leur répondrais «ce sang-là dans ma face, c’est même pas la pointe de ma trisstess, ma trisstess descend tellement profond dans mon ventre qu’elle mange mon foie messieurs dames, elle se rebelle même contre mes reins, j’suis rendue jaune (pas-serein), mais je le sens pas je te le jure, parce que comment changer le mal de place quand on a mal au cœur-corps au complet?»

Plus grande que moi sur les épaules de mon père.

Aujourd’hui je suis triss-pour-vrai, messieurs dames, tenez-le vous pour dit, votez pour ma trisstess, elle est vraie, elle est grande, plus grande que moi-même, plus grande que moi-même sur les épaules de mon père, plus grande qu’une girafe au zoo. Croyez-la, aidez-moi à l’entretenir, elle a des chances de se hisser aux sommets, je vous le dit, si je pouvais la dessiner personne en reviendrait, elle est plus grosse que ta liste de contacts, plus hideuse que le monde qui font du bullying, plus sneaky qu’un rhume en juillet, plus ordinaire que ça, tu meurs.

Photo : Christian Quezada