Notre rencontre ordinaire.
par lolmaquerelle
C’est pas tout le monde qui se laisse toucher dans la face ET je n’ai pas ou très peu d’intuition. Deux données hétéroclites? Non. Ce soir-là j’ai su que t’allais me laisser te toucher dans la face, c’était une intuition.
T’sais y’a des soirées tout est aligné on dirait, OR tu avais mis ta petite face et moi mes belles bottines alors c’est comme si on avait couru après, je sais pas trop, t’avais un drôle de chapeau, mais des fois je me dis que ça a même pas rapport, on se serait connus quand même, j’ai fini par te remarquer, t’as même pas fait de grands signes pis je me suis retournée vers toi, encore mon intuition je pense, c’est fucké j’y pense toujours.
Je t’ai même pas vu tout de suite quand on s’est mis à parler, j’en reviens pas que je t’ai pas vu, maintenant je te vois partout j’ai l’impression, dans le métro-boulot-dodo surtout. Le jour de notre rencontre t’avais ta petite face, j’ai remarqué ton très petit visage, ça tombe bien j’ai de très petites mains, j’ai tout de suite su que ça allaient fitter.
Le jour où on s’est rencontrés, j’y reviendrais cent mille à l’heure back and forth pendant quatre ans pis on dirait pas que je me tannerais, je te le dis c’est fou cette soirée-là je l’adore, elle est au sommet de mes récents souvenirs, j’y pense le plus souvent possible pour qu’elle se mette d’elle-même dans ma mémoire à long terme, j’essaie de penser à des petits trucs que j’aurais oublié, c’est fucké, j’ai fait plein de rencontres dans ma vie, avec genre Éric Lucas entre autres, mais même lui avec ses abs je le trouve pas autant sexy que toi avec tes crisses de grosses dents, c’est bizarre en avoir autant et être capable de bien sourire quand même, en tout cas.
Des fois je me dis encore que ça a servi à rien, notre rencontre, mais j’ai fini d’être fâchée, y’a tellement plein de situations qui arrivent pour rien genre quand tu sors de l’ascenseur et que la personne pense que tu vas à droite, donc elle se tasse à droite et finalement (je te laisse deviner la suite) ben tu vois ça c’est une situation qui sert pas mal à rien, je sais pas encore si on s’est rencontrés pour rien faut que tu me laisses y penser deux minutes. C’est comme si je m’en allais à droite en sortant de l’ascenseur, mais que t’étais même pas devant à checker de quel bord j’allais, genre que je serais sortie d’un ascenseur au centre-ville et que j’aurais pris le bus jusqu’à chez vous pour aller devant toi faire op scuse op scuse (rire timide coudonc il va de quel côté) op scuse hihi, veux-tu aller prendre un café tant qu’à y être? Ça fait pas de sens, pas que je sois quelqu’un de sensé, mais ça je le catch que ça fait pas de sens.
J’ai pris ma décision. Je crois sincèrement que notre rencontre n’était pas sensée avoir lieu. Je soupçonne de plus en plus notre rencontre d’être un quiproquo. Un quiproquo qui remet sur la track en estique, par exemple. Qui redresse l’égo, qui dépogne le noeud dans le ventre, qui enlève un peu de rond dans les épaules. Un quiproquo qui fait du bien par où qui passe. On s’est pris pour ce qu’on était pas, on s’est pris pareil. Merci. Un quiproquo de plus pour moins d’ennui. Un quiproquo réussi, puis révolu. C’est correct. T’as été un estique de nice quiproquo à avoir.
Je me souviens tu me faisais des blagues concernant un porte-clé en forme de tête de mort que t’avais donné ton petit frère avant de mourir, ayoye que je savais pas si fallait que je ris. J’ai demandé à mes amis qui t’étais, ils savaient pas plus que moi, shit c’est quelque chose rencontrer quelqu’un qu’on a jamais vu en se tenant toujours avec le même monde, on pense au destin, c’est ben sûr, c’est niaiseux aussi.
C’est ben sûr qu’on s’est pas lâchés de toute la soirée, on a cru au destin, je viens de le dire. Une fois par quatre ans je me pose pas de question et là c’était ce genre de soirée-là, tu le savais pas, mais tu venais de gagner le jack pot, mon moment de plénitude, toute pou toi bé.
On parlait vite vite vite (-8888) pour apprendre à se connaître à la vitesse de l’éclair pour que ça fasse pas bizarre si on finissait ensemble. On voulait pouvoir dire le lendemain matin : «C’est comme si on s’était toujours connus», mais en le pensant vraiment. Je t’ai obligé à me chanter une chanson et tu m’as chanté ma chanson. J’ai dit : «Sweeeeetest thing» (dans ma tête, à voix haute j’aime pas ce que ça donne). Aye je te donnais des gros coups de yeux pleins d’eye-liner pis tu me renvoyais des uppercuts de mordages de lèvre pas possibles, de regards de haut en bas et de bas en haut et de rapprochements pas subtiles pentoute.
Si notre relation s’était résumée à notre rencontre, non seulement j’aurais vraiment des beaux yeux, des beaux cheveux et du beau linge (j’étais vraiment swell, je m’en rappelle), mais mes bottines seraient pas complètement scrappes parce que je les ai trop portées dans la pluie, le monsieur au magasin m’avait pourtant dit : «no rain for shoes», Ça, ce sont mes éléments d’apparence saine de notre rencontre.
Pour le reste, ben là c’est dull quand j’y pense. J’en reparlerai peut-être une autre fois, mais pas trop parce que je voudrais pas shipper ça dans ma mémoire à long terme.