Ma citrouille décôliquée.

par lolmaquerelle

L’autre jour, ta mère parlait de ton enfance pis j’écoutais juste à moitié. J’étais vraiment bonne pour faire semblant que ça m’intéressait. Dans l’autre pièce, y’avait une émission de cuisine que je trouvais vraiment intéressante. Poêler des patates, avec du thym. J’aurais aimé mieux qu’on regarde la télé tout le monde ensemble. Tranquilles. Pu parler. Je me suis imaginée faire mute sur la situation et j’ai ri toute seule. C’tait parfait, ça concordait avec une histoire de balançoire de laquelle tu tombais, nice, je te dis, vraiment bonne pour faire semblant que je suivais la game. Dans l’auto en revenant, je me sentais comme c’te fois-là, quand j’avais peut-être six ans et que ma citrouille décorative sur le balcon s’était faite décôliquer par des vandales pendant la nuit. Je la regardais par la fenêtre, impuissante. Le mal était fait. Ça arrive même sur les petites rues tranquilles. Ça nous arrive même à nous. Je l’ai pas vu venir et ça sert à rien de se demander si on aurait pu faire quelque chose pour éviter ça.
Ces temps-ci j’ai la face sèche, mais les cheveux gras. Rien m’intéresse, j’suis lasse, je suis sur le pilote automatique, des fois je ris, c’est le fun, après ça j’arrête de rire, mais je m’en fous.
Je suis pas nostalgique de d’autres années passées avec toi. Tu me dégoutes pas non plus, tu me déranges juste pas. C’est justement ça je pense, tu me déranges pas pentoute. T’es comme un sandwich, pour moi. On crave pas un sandwich, tu comprends. Je juge pas ceux qui le font, c’est juste pas mon crave, les sandwichs. Sauf si j’ai vraiment faim mettons. Je me souviens plus trop c’est quoi l’amour avec toi. C’est flou. La seule affaire qui me vient en tête quand je pense à toi, c’est que t’as cette manie de toujours dire « je t’ai appelé au téléphone ». Ça, c’est pas mal next level gossant. En tant que tel, on s’en fout, tout le monde descend en bas pis monte en haut, c’est un pléonasme comme un autre, mais téléphoner au téléphone, ça m’écoeure. Je sais pas si c’est parce que ça vient de toi.
Des fois je t’imagine faire des affaires vraiment hot, genre monter l’Everest ok, pis je me teste, je me demande ce que ça me fait. Si ça me fait quelque chose. Si je suis fière, si ça me donne envie de quelque chose, si toi qui montes l’Everest fait quelque chose dans mon ventre. La plupart du temps; non. L’Everest c’est juste un exemple de même j’ai plein d’autres exemples. Je m’imagine qu’on fait une tarte, qu’on écrit un poème, qu’on part en voyage, mais ça me chatouille de nulle part. D’autres fois je t’imagine embrasser quelqu’un d’autre pis là je me dis ouach j’en reviens pas. Mais ça a rien à voir avec toi, c’est juste un petit trip d’ego t’sais je supporterais pas que tu embrasses quelqu’un d’autre, mais je supporte très bien jamais rien te conter de mes journées, rien te dire de mes trouvailles, t’ignorer semi quand je te croise chez nous, pas t’avertir quand mes plans changent pis faire semblant que c’est toi qui comprends rien. Moi non plus j’aime pas ça nous voir quand je me mets à nous regarder, on est dans la même pièce, mais pu jamais ensemble. Tu parles de raviver la flamme, mais ça fait rien résonner dans moi et j’ai de la difficulté à croire que tu penses réellement qu’il reste quelque chose à raviver, je me demande si tu dis ces choses-là par réflexe, parce qu’on est censé vouloir sauver les meubles, parce qu’on est supposés y tenir plus que tout. Mon couple mon phare. Je sais pas. On est morts pis j’arrive pas à trouver ça triste.
Je pensais que si notre amour mourrait, ce serait parce que je serais dans une bulle weird dans laquelle je te trouverais laid ou bedon moins cool que moi, une mauvaise passe, rien de valable. Même pas. Je me suis rendu compte que je me forçais à te trouver donc ben spécial. Un peu comme j’adoucis mon look avant une réunion de famille. Par habitude, par paresse aussi. Par respect peut-être. J’essaie de me parler, m’arranger pour que notre fin arrive pas, mais c’est forcé. Quand tu touches mon sein, le soir, dans le lit. C’est comme si t’ouvrais une porte d’armoire, dans une maison à 200 km de moi. T’as peut-être l’impression que tu vas trouver quelque chose, mais si oui j’ai aucun rapport là-dedans. Quand je te regarde, j’ai l’impression de regarder une pancarte de maison à vendre. Je connais pas ces gens-là, mais je leur souhaite quand même de vendre leur maison, que tout se passe bien, qu’ils trouvent ce qu’ils cherchent comme ça; empathie prévisible.
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J’ai peur des fins comme toi.