Des coups d’agressivité dans mes roues de vélo.
par lolmaquerelle
J’aimerais ça qu’on se revoit jamais, je pense.
Je dis ça pis je m’inquiète en même temps, j’ai peur que tu m’exauces.
J’aimerais ça jamais revoir tes cheveux de poussin sur le top d’une tête dont la forme se peut même pas pis tes mains à moitié fermées tout le temps comme si tu trainais des petits oeufs fragiles partout où tu vas.
Un jour sur deux, je me dis que j’ai déjà aimé une crotte de nez. Que j’aurais un jour sacrifié ma vie pour qu’une crotte de nez vive à ma place. Crotte de nez > Moi.
J’exagère pas, je pense.
Le jour d’après, j’ai envie qu’on s’assoit tranquilles pis qu’on essaie de comprendre qu’est-ce qui nous est arrivé. Je pense que tu penses que je le sais. Je joue bien mon jeu, j’en ai aucune idée.
Je peux faire semblant que je le sais et t’accuser de plein d’affaires si tu veux. C’est plus le monde autour de moi qui me regardait t’aimer en silence qui pourrait te reprocher des trucs, je pense. C’est plus le monde que j’ai mal aimé pendant que je t’aimais toi qui pourrait te reprocher des trucs, je pense. C’est plus ma porte de chambre fermée sur le reste du monde que je pourrais te reprocher, je pense. Des REPROCHES, sacrament, ouash. C’est juste compliqué pour moi de faire le choix entre crotte de nez ou ben parler avec toi parce qu’avant qu’on se gâche, je pensais vraiment qu’on avait inventé quelque chose. J’étais persuadée qu’on était l’invention du siècle. Les autres avaient rien compris pentoute.
Des fois je pense à toi quand j’suis à vélo, je dis ton nom à répétition dans ma tête, pis je me mets pas à pédaler plus vite. Je pense que j’aimerais ça qu’on se revoit pas parce que j’ai peur de recommencer à donner des grands coups d’agressivité dans mes roues de vélo les semaines après qu’on se soit revus.
Te forçais-tu pour être ce que tu étais avec moi?
T’es tellement stressé quand on se voit, c’est tu parce que t’oublies ton texte? T’oublies ton personnage de celui que tu penses que je veux que tu sois faque tu stresses? Moi aussi, je suis stressée quand je te vois. J’ai chaud dans la face, tu le sais, mais moi, c’est pour exactement l’inverse. Je prépare trop d’affaires et je fais rien. Je te regarde même pas comme j’avais prévu le faire, je te regarde en t’ignorant à moitié, pour rien au monde j’te renverrais tes regards. J’aimerais que tu saches ce que je prévois faire, tu t’en doutes pas, j’suis sûre. C’est pour ça que je veux te le dire. Chaque fois que j’imagine nos retrouvailles, je m’imagine toujours le même scénario.
Te prendre dans mes bras, longtemps.
Je t’ai pas assez touché, je trouve.
Dans tous les sens.
C’est pour ça que j’aimerais qu’on se revoit jamais.
Je veux pas un jour oser te toucher autant que j’aurais du le faire parce qu’à partir de là, on s’en sortirait pas. Tout serait à refaire et je comprendrais pas plus ce qui se passerait, je pense.
Photo : Christian Quezada